
Yann Tiersen
Le Brestois Guillaume Yann Tiersen voit le jour le 23 juin 1970 et grandit à Rennes. Son médiocre parcours scolaire est compensé par un brillant cursus dans différentes classes de conservatoire (violon et piano) où, à l'instigation d'un père mélomane, il s'initie également à la direction d'orchestre. Rennes, capitale du rock français des années 80, permet toutefois à l'adolescent de délaisser la musique classique pour s'intéresser à des expressions plus électriques (il restera durablement marqué par les disques des Stooges et de Joy Division), notamment à l'ivresse du post-punk. Il commence très jeune à composer des musiques à programme, en ponctuation de courts métrages ou de pièces de théâtre.
Son premier album, compilation de ses travaux antérieurs (La Valse des Monstres, 1995), malgré un travail très personnel et sensible sur la matière acoustique, ne rencontre pas son public (mais avec une pièce intitulée « Quimper », force est de constater que la Bretagne reste au coeur de son inspiration). Il en est de même avec Rue des Cascades (1996). En revanche, son personnage de démiurge, encadré d'une brigade d'instruments inusités dans ce genre de contexte (clavecin, xylophone, accordéon, piano-jouet), laisse une impression durable aux spectateurs du festival de théâtre d'Avignon, tout comme à ceux des Transmusicales de Rennes : Yann Tiersen est désormais une gloire locale.
En 1998, l'album Le Phare (enregistré partiellement sur l'île d'Ouessant) et plus particulièrement la chanson « Monochrome » (en collaboration avec Dominique A, qui y chante) servent de déclencheur : on entend désormais Yann Tiersen à la radio, les metteurs en scène André Téchiné (Alice et Martin, 1998) et Erick Zonca (La Vie rêvée des anges, César du meilleur film) utilisent ses thèmes : c'est Rue des Cascades (interprétée par la chanteuse favorite de Yann Tiersen à l'époque, Claire Pichet), qui égrène le générique de fin de La Vie rêvée... A cette occasion, Yann Tiersen entame une romance avec Natacha Régnier. Ils auront un enfant ensemble.
En 1999, l'émission Black Sessions, animée par Bernard Lenoir, est l'occasion de l'édition d'un disque, enregistré en compagnie de Bertrand Cantat (Noir Désir), Neil Hannon (Divine Comedy), les Têtes Raides, Françoiz Breut et beaucoup d'autres. Enfin, le Breton crée son propre label (Ici d'Ailleurs), sur lequel il édite le premier album de Bästard, héritier de la no-wave new-yorkaise.
Au mois de mars 1999, Tout Est Calme, enregistré dans l'appartement parisien du compositeur (et accueillant The Married Monk), infléchit, à partir de dix nouvelles versions d'anciennes compositions, un virage vers le rock. L'artiste enchaîne alors concerts parisiens et tournées à l'étranger (Asie), participe à un album collectif en faveur des sans-papiers et propose une compilation des artistes de son label. Il remixe également la chanson « A Ton Etoile », qui figure sur One Trip/One Noise, album de remixes de chansons de Noir Désir.
Au mois d'avril 2000, il ouvre le concert londonien de Juliette Gréco, puis joue du vibraphone dans Vingt à Trente Mille Jours, nouvel album de Françoiz Breut. Un an plus tard, presque jour pour jour, sort L'Absente : l'album accueille Neil Hannon, Lisa Germano (ancienne choriste des Simple Minds), Dominique A, ainsi que Natacha Régnier, pour un rare duo où l'on peut entendre la voix de Yann Tiersen. Simultanément, Le fabuleux destin d'Amélie Poulain de Jean-Pierre Jeunet - qui a entendu des pièces du Breton à la radio - entame l'ascension du box-office, ce qui mènera près de dix millions de spectateurs français à voir le film. La bande originale, signée Tiersen (en fait un véritable best-of, agrémenté de huit nouvelles pièces), se vend à 600 000 exemplaires. Les Victoires de la musique, volant au devant du succès, attribuent au compositeur celle de la meilleure musique de film.
L'Absente, bénéficiant de l'élan, s'écoule à près de 100 000 copies. On découvre désormais Yann Tiersen à rebours, remontant le fil de ses précédentes productions discographiques. La tournée qui suit est ponctuée de quelques dates prestigieuses : Printemps de Bourges, Fête de la musique devant l'Assemblée Nationale ou encore parvis de l'Hôtel de Ville de Paris pour la célébration du centenaire de la Loi de 1901 (légiférant le statut des associations à but non lucratif).
L'année 2001 se conclut par la participation à un hommage à Brassens (Les Oiseaux de Passage), où il chante « Le Parapluie » en duo avec Natacha Régnier, à une partie de violon interprétée sur l'album Gratte-Poil des Têtes Raides et à l'album de The Married Monk, pour lequel il fournit cordes et vibraphone. En 2002, c'est l'ensemble de ces prestations publiques qui permet la réalisation de C'était Ici, double album où sont encore une fois invités les Têtes Raides et Dominique A. De plus, Yann Tiersen produit et arrange 13m², album de David Delabrosse, qui a ouvert pour lui les concerts de la tournée qui vient de s'achever.
Au mois de février 2003, Yann Tiersen compose la musique de Goodbye Lenin!, film allemand de Wolfgang Becker (César du meilleur film européen). Au mois de décembre, il offre un CD trois titres à la Fédération internationale des Droits de l'Homme. En 2004 est édité l'album Yann Tiersen and Shannon Wright : le Breton et la chanteuse américaine ont composé les chansons en un mois.
L'album Les Retrouvailles en 2005 (enregistré en compagnie de rien moins que Jane Birkin, Miossec, Liz Fraser de Cocteau Twins et Stuart Staples de Tindersticks) est suivi d'une nouvelle tournée. Le DVD La Traversée, d'Aurélie du Boys, conte la même année la genèse de l'album. En 2006 paraît l'album On Tour (édition couplée avec celle d'un DVD), dans lequel intervient Katel (il le lui rend bien, en assurant le violon dans l'album de la jeune chanteuse, Raides à la Ville) et Yann Tiersen joue de la guitare et des claviers sur The Endless Rise of the Sun, album de Smooth.
L'album Tabarly (2008) constitue la bande originale d'un documentaire signé Pierre Marcel, en hommage au navigateur nantais, disparu dix ans auparavant. Le compositeur participe également à Banquet de Cristal, dixième album du groupe finistérien Red Cardell. Enfin, il a édité deux recueils de transcription pour piano de ses oeuvres, dans lesquels figure en particulier une certaine « Valse d'Amélie ».Yann Tiersen vit à Paris mais transporte toujours avec lui un univers original, construit autour de rencontres : avec d'autres musiciens, dont il aime multiplier les apparitions sur ses albums. Avec de nouvelles couleurs musicales, qu'il se charge de mettre en forme, en multi-instrumentiste émérite. Il reste assurément l'artisan français le plus accompli d'un nouveau folklore : celui de l'imagination et de l'inventivité. On a à son sujet beaucoup évoqué l'école minimaliste (Michael Nyman, Philip Glass). Il semble devenu aujourd'hui indispensable de lui attribuer une position pleine et entière dans l'histoire de la musique contemporaine.
En 2010, le nouvel album et premier en cinq ans Dust Lane, enregistré entre Ouessant et les Philippines, démontre que le Brestois n'a pas fini de surprendre. L'ouvrage riche en cordes (guitares, quatuor, mandoline, bouzouki), claviers, instruments divers et synthétiseurs vintage déploie huit nouvelles compositions insolites. Dust Lane accueille notamment ses amis Dave Collingwood (Gravenhurst), Syd Matters (harmonies vocales), Gaëlle Kerrien (« Fuck Me ») et Matt Elliott (ex-Third Eye Foundation). En 2011 arrive son successeur Skyline, enregistré par Ken Thomas entre San Francisco, Ouessant et Paris et précédé par le simple « Monuments ». Ce nouvel opus développe les contrastes du chanteur pris entre ses amours rock et les arrangements acoustiques (piano, cordes, percussions).
La richesse d'inspiration de Yann Tiersen ne se dément pas en 2014 avec Infinity, chanté en français, breton, anglais, islandais et féroïen. Pour cette nouvelle incursion dans le domaine du post-rock, le musicien s'entoure d'Aidan Moffatt (Arab Strap), de son confrère féroïen Ólavur Jákupsson et de l'ensemble de cordes islandais Amiina. Il compose ensuite la bande originale du film Ouragan, l'odyssée d'un vent puis s'attelle à un nouvel album personnel qui voit également le jour en 2016, EUSA (« Ouessant », en breton). Celui-ci, entièrement instrumental, est enregistré aux studios Abbey Road à Londres. L'album suivant ALL (2019), composé au piano comme son prédécesseur, comprend les participations vocales de son épouse Emilie Tiersen (alias Tiny Feet), Denez Prigent, Ólavur Jákupsson et Anna von Hausswolff.